Un arrêt du 17 septembre 2015 de la Cour d'appel de Paris condamne Véolia
Débouté en première instance, un Essonnien victime d'une eau impropre à la consommation a obtenu gain de cause devant la cour d'appel de Paris, pour faire condamner Veolia. L'opérateur de l'eau doit lui verser 12.560 euros de dédommagement. Une première selon l'Association France assainissement eau (AFAE)
Résumé de l'affaire
M.
Orsini est propriétaire d'une maison dans le département de
l'Essonne à
Abbeville-La-Rivière,
2 route de Fontaine. Il a rencontré depuis plusieurs années des
problèmes
avec la qualité de l'eau qui lui était fournie.
C'est
dans ces conditions qu'il a fait assigner le 19 Janvier 2012 la
société Veolia
Eau
– compagnie générale des eaux pour dommages et intérêts et pour
obtenir une
injonction
de prendre les mesures nécessaires pour assurer la fourniture d'une
eau potable.
M.Orsini
est propriétaire d'une maison dans le département de l'Essonne à
Abbeville-La-Rivière,
2 route de Fontaine dont la distribution d'eau est assurée par la
société
Veolia - Eau.
Au
titre d'abonné, il est confronté depuis plusieurs années à la
fourniture
d'une eau non conforme aux standards en vigueur ainsi que le révèlent
les différentes analyses effectuées entre 2007 et 2012 ; il a formé
appel de la décision rendue
en
première instance en ce que la responsabilité de la société
Française de distribution d'eau
(ci
après dénommé SFDE),
venant aux droits de la société Pichon, bénéficiaire par
délégation
par affermage du service d'eau potable sur
le territoire du Syndicat intercommunal
des eaux du plateau de Beauce
(ci après dénommé SIAEPB)et celle de la société
Veolia Eau n'ont pas été retenue par les premiers juges ;
Sur l'origine de la non-conformité aux normes en vigueur de l'eau fournie
Il
n'est ni contesté ni contestable, au regard des résultats d’analyse
des divers
laboratoires
Cofrac et Gde en date des 20 septembre 2007, 17 décembre 2008, puis
des
expertises
de l'ARS du 19 août 2011 et 30 mai 2012, que les prélèvements
analysés
présentaient
des caractéristiques physicochimiques non conformes aux limites et
références
de
qualité des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation
humaine définies par
l'arrêté
du 11 janvier 2007 et par le code de la santé publique comme
pouvant
directement
représenter un danger pour la santé humaine.
Il
n'est également ni contesté ni contestable que l'origine de ce
problème a été
rapidement
identifiée et que,
dans sa lettre du 20 juillet 2011,
Veolia écrit à M. Orsini qu'il
est
alimenté en bout de circuit par une antenne non maillée ce qui
explique d'éventuelles
eaux
stagnantes, que suite à une première intervention en 2009, il a été
remis au président
de
la SIAEP une proposition d'installation de plusieurs purges
automatiques,
et que la
société
est en attente de l'acceptation par le Syndicat du Plateau de Beauce
de cette
proposition
technique.
La
SFDE,
qui est liée au
SIAEPB par un contrat d'affermage et Veolia Eau exposent que
le
SAIEPB
a fait procéder aux travaux d'installation en janvier 2012 de 300m
linéaires
de
canalisation pour connecter le réseau de la commune de Abbeville la
Rivière à celui de
Fontaine
la Rivière et a procédé à l'installation d'une vanne électrique
qui permet la purge
automatique
de la canalisation ;
Si aucune pièce n'est versée au débat sur la réalisation de ces travaux, ils ne sont pas
contestés
et le résultat est positif puisque les analyses du 14 décembre 2012
présentent une
teneur
en fer conforme et aucune trace de nickel. Il
en résulte que M.Orsini a été alimenté de 2008 à 2012 d'une eau
qui ne présentait pas
les qualités auxquelles il pouvait prétendre.
Sur la responsabilité de la SFDE et Veolia Eau au regard des contrats en cours
Aux
termes du contrat d'affermage en son article 1.3 : Objet et étendue
de la
délégation
il est stipulé :
«
La
collectivité confie au délégataire le soin exclusif d'assurer à
ses risques et
périls
la gestion et la continuité du service public de la distribution de
l'eau potable à
l'intérieur
du périmètre de la délégation.
Cette
clause d'exclusivité ne concerne pas les travaux neufs.
La
gestion du service public inclut l'exploitation, dont notamment
l'entretien et la
surveillance
des installations, la réalisation des travaux mis à la charge du
délégataire,
ainsi
que les relations avec les usagers du service.
»
Aux
termes de l'article 1.5 dudit contrat : Responsabilité du
délégataire, il est stipulé
:
«
Le
délégataire est responsable du bon fonctionnement du service. Le
délégataire
est
responsable tant vis à vis de la collectivité que vis à vis des
tiers des dommages
occasionnés
par le fonctionnement du service délégué, y compris du fait de la
qualité de
l'eau.
La
responsabilité du délégataire recouvre notamment :
-
vis à vis de la collectivité et des tiers, l'indemnisation des
dommages corporels, matériels immatériels
et financiers qu'il est susceptible de causer lors de l'exercice de
ses activités telles
que définies par le présent contrat.
La
responsabilité civile résultant de l'existence des ouvrages dont la
collectivité est
propriétaire
incombe à celle-ci. »
Enfin,
aux
termes de l'article 6.4 dudit contrat : Qualité de l'eau :
«
L'eau
distribuée doit respecter les critères de qualité imposés par la réglementation
en vigueur.
Le
délégataire doit respecter la qualité de l'eau distribuée aussi
souvent que nécessaire
(…).
Il
est toujours responsable des dommages qui pourraient être causés
par la mauvaise
qualité des eaux, sauf pour lui à exercer les recours de droit
commun contre les auteurs
de la pollution. »
De
l'analyse des faits et des termes du contrat liant le syndicat
intercommunal des eaux
du Plateau de la Beauce et la société Pichon aux droits de laquelle
vient la société
Française
de distribution d'eau et du contrat d'abonnement liant M. Orsini à
Veolia Eau, il
ressort
que le délégataire est toujours responsable de la qualité de l'eau
et de la réparation
des
dommages causés (article 1.5 et 6.4 du contrat ) ;
Si
M. Orsini a diligenté dans son immeuble une analyse le 5 août 2008
par le
laboratoire
GDE constatant la non-conformité de l'eau, il a alerté la société
Veolia Eau avec
laquelle
il a contracté et à laquelle il règle ses consommations d'eau par
courriel le 8 juin
2011
; que
la société Veolia n'a pas contesté ces problèmes de qualité
rendant l'eau fournie
impropre
à la consommation, offrant à M.Orsini de déposer un pack de
bouteilles d'eau
devant
sa porte ;
La
société Veolia Eau lui a répondu le 20 juillet 2011 en trois
points :
-
En faisant valoir la prise de mesures provisoires (purges régulières
en 2009, 2010,
2011
).
-
En
rappelant que,
lors de leur première intervention en 2009,
la société avait identifié
l'origine
du dysfonctionnement et remis au président du SIAEPB une proposition
d'installation
de plusieurs purges automatiques sur le syndicat dont ce point noir,
purges
automatiques
qui permettraient de résoudre ce problème d'eau stagnante.
-
En précisant : « a ce jour nous n'avons pas eu de retour. Nous
venons de refaire
part
de votre problème pour accélérer la pose d'une purge automatique
en bout d'antenne.
En
attendant l'acceptation par le Syndicat de notre proposition
technique, nous nous
engageons
à effectuer une purge mensuelle pour éviter tout nouveau
désagrément.
Il
résulte de ces éléments que,
tant la société Veolia que la SFDE,
ont relevé pendant
trois
ans les anomalies signalées par M.Orsini sans y remédier de façon
efficace avant 2012.
En
conséquence, la SFDE, au visa des articles du contrat d'affermage ci
dessus
rappelé,
se trouve responsable vis à vis des tiers de la qualité des eaux
fournis,
notamment
au
regard de l'article 6.4, ainsi que Veolia Eau au titre du contrat
d'abonnement souscrit par M.
Orsini, étant par ailleurs démontré, notamment dans son courrier
du 20 juillet 2011, que la
société Veolia Eau s'est trouvée au coeur de la résolution de
cette affaire par sa
connaissance
du dossier, ses interventions techniques et sa demande d'autorisation
de
travaux
auprès du président de la SIAEPB (article 2.7 du contrat
modification des
installations
à l'initiative du délégataire) ;
En
effet,
l’abonné est en droit d'exiger que l'eau du service public soit
potable et
propre
aux divers usages auxquels elle est employée, ainsi que le rappelle
la
recommandation
n° 85 -1 de la Commission des clauses abusives relative aux contrats
de distribution
de l'eau qui
relève :
«
que,
quelque soit le mode juridique de distribution, les relations entre
l'usager et
le
service chargé de la distribution d'eau communément appelé «
service des eaux », résulte d'un
contrat d'abonnement appelé « règlement du service des d'eau » et
que ce contrat se trouve,
du fait de sa nature même, soumis au régime de droit privé, que sa
responsabilité est
régie par les règles de la responsabilité civile, que l'obligation
de fournir une eau propre
à la consommation humaine est une obligation de résultat qui
procède des règles d'ordre
public qui ne cède que devant la preuve d'une impossibilité
d'exécution due à un cas
de force majeure ».
En l'espèce, la non-conformité de l'eau n'était pas un événement inévitable, irrésistible, insurmontable puisqu'il trouvait sa cause dans un problème technique parfaitement identifié tant par la société Veolia que par la SFDE et pour lequel il existait une solution dont la réalisation a seulement tardé ;
En l'espèce, la non-conformité de l'eau n'était pas un événement inévitable, irrésistible, insurmontable puisqu'il trouvait sa cause dans un problème technique parfaitement identifié tant par la société Veolia que par la SFDE et pour lequel il existait une solution dont la réalisation a seulement tardé ;
Il
s'ensuit donc
que
la société Veolia et la SFEDE ont manqué à leur obligation qui
est une obligation
de résultat ;
Sur la réparation du préjudice
Aux
termes de l'article 6.4 dudit contrat : Qualité de l'eau :
«
L'eau
distribuée doit respecter les critères de qualité imposés par la réglementation
en vigueur.
Le
délégataire doit respecter la qualité de l'eau distribuée aussi
souvent que nécessaire (…).
Il
est toujours responsable des dommages qui pourraient être causés
par la mauvaise
qualité des eaux, sauf pour lui à exercer les recours de droit
commun contre les auteurs
de la pollution »
;
Il
n'est pas contestable que M. Orsini n'a pu utiliser l'eau distribuée
ni à fin de consommation,
ni d'hygiène, ni alimentaire alors qu'il s'agit d'un élément
essentiel pour la
jouissance
normale d'un pavillon d'habitation ; la durée d'occupation du
pavillon par
M.Orsini
ne saurait lui être opposée dès lors que le défaut d'eau
consommable et même
utilisable
en termes d'hygiène constituaient à l'évidence un obstacle à
celle-ci ; dès lors,
son
préjudice
de jouissance qui est certain, direct et personnel, sera fixée à 30
% de la valeur
locative
de son pavillon ;
Si
les intimés contestent tout principe de responsabilité sur des
bases inopérantes
ainsi
qu'il a été démontré, ils proposent à titre subsidiaire que le
préjudice de jouissance soit évalué
sur la base d’une location évaluée à 450 € mensuel alors que
M. Orsini estime cette valeur
à 892,23 € en se fondant sur des annonces parues sur le site
Seloger.com ; il convient de
relever que cette annonce concerne des pavillons neufs situés en
centre ville à proximité de
la gare RER alors que celui de M.Orsini est ancien et situé à plus
de 10 kilomètres de la gare
RER ; prenant en compte ces éléments la Cour fixera à 700€ la
valeur locative de référence
et en conséquence le préjudice de jouissance subi par M.Orsini à
compter de l'année
2009, préjudice prenant en compte le paiement par celui-ci des
factures de consommation
d'eau, et le fixera à 700 € x 0,30 x 12 x 3 soit 7 560 € ;
M Orsini prétend avoir subi un préjudice moral en raison notamment de la présence
au
foyer d'un enfant en bas âge né le 8 mai 2011 (2 ans à l'époque
des faits )et l'inquiétude
liée
à la santé de celui ci ; Il ne conteste toutefois pas que
l'occupation du pavillon a été
ponctuelle
de sorte qu'il y a lieu de limiter ce chef de préjudice à la somme
de 1 000 € ;
la décision de la cour d'appel
LA
COUR, statuant
publiquement contradictoirement et en dernier ressort ;
CONDAMNE
in
solidum la Société Française de Distribution d'Eau et la société
Veolia
Eau in solidum à payer à M. Orsini la somme de 7 560 € augmentée
des intérêts au
taux
légal à compter de la mise en demeure du 8 juin 2011.
CONDAMNE
la
société Française de Distribution d'Eau et la société Veolia Eau
in
solidum à payer à M. Orsini la somme de 1 000 €.
CONDAMNE
la
société Française de Distribution d'Eau et la société Veolia in
solidum
in solidum à payer à M. Orsini la somme de 4 000 € au titre de
l'article 700 du
nouveau
code de procédure civile.
CONDAMNE
la
société Française de distribution d'Eau et la société Veolia Eau
aux
dépens
qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 600
du code de
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