L'expérimentation tarifaire: Impossible?
Résumé des chapitres précédents:
Nous l'avons dénoncé dans notre article du 8 octobre rendant compte du conseil d'administration de la régie du 14 septembre : nous avons entendu ce jour-là un Exposé du cabinet Espelia visant à réduire drastiquement la marge de choix possible pour le tarif de l'eau potable de la régie . Notamment, il nous a été indiqué qu'une tarification comportant une tarification sociale ou encore avec une première tranche gratuite était réservée pour les collectivités ayant été autorisées à pratiquer l'expérimentation en application de la loi "Brottes" du 15 avril 2013 , c'est à dire les 50 collectivités listées dans le
Décret n°2015-416 du 14 avril 2015. Comme le délai laissé aux collectivité pour se porter candidates à cette expérimentation s'est terminé le 31 décembre 2014, cela voudrait dire que les collectivités qui fixent leur tarif depuis se verraient interdire des modulations....
Ce qui serait nécessairement le cas pour les communautés d'agglomérations crées après cette date telles que CEA......hé ben, çà c'est pas d'chance!
Quand on veut , on peut
Il s'agit d'une contrevérité proférée en pleine connaissance de cause: en effet Espelia cite à plusieurs reprises dans son exposé le livre d'Henri Smets , de l'Académie de l'eau ,
les
nouveaux tarifs pour l'eau potable . Ce livre mis à jour en 2013 après la loi Brottes . constitue la somme d'information la plus récente et la
plus complète en matière de tarifs différenciés.Il recense et analyse plusieurs grilles tarifaires prévoyant une première part gratuite ou quasi-gratuite et une modulation.
Ces grilles ont été mises en oeuvre en dehors de l'expérimentation admise par la loi Brottes et, pourtant, aucune des collectivités à l'initiative des ces tarifications n'a essuyé de remarques des services préfectoraux chargés du contrôle de leur légalité.
Citons quelques uns de ces exemples de régies
pratiquant la gratuité les premiers mètres cubes et/ ou des
tarifications équitables
Sources: Ces informations
ci-dessous viennent le plus
souvent des sites internet et des rapports annuels sur la qualité et le prix
de l'eau des régies concernés sinon il s'agit d'exemples repris dans
le livre d'Henri Smets lui même
Roquevaire
(Bouches du Rhône)
Le 19 décembre
2011, le conseil municipal de Roquevaire, une ville des
Bouches-du-Rhône, approuvait à la quasi-unanimité une délibération
instaurant une « tarification solidaire et responsable de
l’eau ». Cette tarification progressive se compose de trois
tranches : l’eau « vitale », qui correspond aux
trente premiers mètres cubes, puis l’eau « utile »,
jusqu’à cent vingt mètres cubes, et, enfin, l’eau de confort.
La part fixe a été supprimée
Quand on a
commencé à étudier ce projet, on s’est vu opposer tout un tas de
réglementations, de décrets, de lois… On a compris que nous
n’avions pas le droit de pratiquer la gratuité, explique Yves
Mesnard, maire (PCF) de la commune depuis 2008. Plutôt que de
partir dans un interminable combat devant le tribunal administratif,
on a choisi de faire plus simple : fixer un prix dérisoire. »
Ainsi, depuis le 1er janvier 2012, pour les trente premiers mètres
cubes d’eau potable, les Roquevairois déboursent… un euro !
Cette quasi-gratuité, accompagnée de tarifs avantageux pour les
volumes suivants, n’a pas entraîné de hausse de la consommation
moyenne. Au contraire : alors que la population a augmenté
entre janvier 2012 et décembre 2013, la consommation globale d’eau
a légèrement baissé.
Martigues
(Bouches du Rhône)
La régie pratique 3
tranches pour les usages des ménages, 0,59€ de 0 à 50 m3, 1,01 €
de 51 à 100m3 1,15€ au-delà, et 3 tarifs différents pour les
industriels, les administrations et l'arrosage public :
Pradines
(Lot)
supression de la part fixe , puis 4 tranches progressives 1,15€
(0-30m3) 1,40 (30-90m3), 1,58(90-120m3 et 3,30€ au-delà
Communautés
de communes des côteaux du Vexin (Limay, Guitrancourt, CCCV
Cette tarification s'inscrit d'emblée comme une application du « droit à l’eau ». Elle instaure la gratuité
de 40% des volumes d’eau consommés pour les ménages qui ont un
usage domestique, s’appliquant à la part « eau ».(la
part « assainissement » et l’abonnement restent
inchangés.) On garantit la gratuité des premiers mètres cubes
d’eau (par le biais de la réduction du volume facturé)
indispensables à l’hygiène et l’alimentation, soit entre
15 et 20 m3 par an et par personne.Les locataires bénéficient aussi du même dispositif. La gratuité de 40% des volumes consommés, est répartie par le bailleur par unité de logement : Au tantième ou selon compteur individuel le cas échéant.
La CCCV s’assure de l’engagement des bailleurs au travers de la signature d’une charte d’engagement.
Une communication est faite auprès des habitats collectifs, charge au locataire de se manifester auprès de son bailleur ou de la CCCV en cas de non application du dispositif.
Enfin, pour ne pas encourager la surconsommation, une majoration de 20% est appliquée pour une consommation dépassant le seuil de 240 m3/an ou 120 m3/semestre. Cette majoration répond à plusieurs préoccupations
-
Un souci de lisibilité de la grille tarifaire (seuil instauré également pour les activités)
-
Un rabais de 40% sur 240 m3 équivaut à 96 m3 gratuits, soit l’équivalent des volumes essentiels à la vie pour un ménage de 4 à 6 personnes
-
Instaurer un signal prix limitant la consommation
-
Maintien de la maîtrise du poids de la facture
Régie
de l'eau potable de DAX:
tarification
progressive mise en place au premier janvier 2014 comporte 6 tranches
de tarification dont la première gratuite pour les 30 premiers
mètres cubes; voir les : tarifs
2016
Régie
Eaux des Lacs de l'Essonne
6 tarifications
différentes selon le volume consommée et la nature de l'abonné,
avec part fixe supprimée pour les ménages à compteur individuel ou
collectif . Voir les tarifs 2015:
Quelques enseignements de ces expériences
En matière de différenciation par catégories d'usagers:
3 catégories méritent d'être différenciées :
* les usagers domestiques
* les activités professionnelles,
* les services publics ou les organismes à but non lucratif
Pour ces 2 dernières catégories, une facturation du coût la maintenance du service d'approvisionnement parait logique sous la forme d'un abonnement modulé en fonction du diamètre. Le coût du m3 d'eau est dans ce cas nécessairement fixe, il peut néanmoins être fixé à un niveau moindre pour les services publics et organismes à but non lucratifs
En matière de gratuité pour les usagers domestiques
les régies optent soit pour une suppression de toute part fixe (abonnement) soit pour la gratuité d'une première tranche plus ou moins importante de consommation.
Seule une régie, celle d'Eaux des lacs (Viry-Châtillon) suppression de la part fixe et gratuité d'une première tranche , mais cette dernière reste alors symbolique comme étant la part correspondant à la survie (les premiers 3% consommés).
Quelques éléments de choix:
Le maintien d'un abonnement ou d'une "adhésion" au service, d'un montant modeste (10 à 15€ par an) peut être une façon d'exprimer que le consommateur n'est pas un simple "sujet" du service, mais que son adhésion lui offre le droit et la possibilité d'être force de proposition pour améliorer le service rendu .
La suppression de toute part fixe garantit une effective gratuité des premiers mètres cubes.
Une première tranche gratuite fixée en % de la consommation et non pas sur un volume fixe (par exemple jusqu'à 20m3 annuels) offre l'avantage de prendre en compte le nombre d'habitants dans le foyer .
Il est essentiel dans ce cas , comme à Limay , d'obtenir que les bailleurs et syndics de copropriété s'engagent à répercuter cette gratuité en la répartissant par unité de logement : Au tantième ou selon un compteur
individuel s'il existe.
En matière de progressivité des tarifs
une tarification différente selon 3 tranches semble la plus adaptée pour apporter un réel bénéfice aux usagers aux revenus les plus modestes tout en veillant à un effet dissuasif de consommations excessives, synonymes de gaspillage ou d'utilisation de confort (piscines, arrosages importants.
pour la différenciation de ces tranches un barème combinant décompte en % de la première tranche gratuite ou quasi-gratuite parait le plus adapté pour concilier objectifs sociaux et environnementaux :
* exemple une première tranche gratuite plafonnée à 30% de la consommation, une seconde tranche à tarif moyen jusqu'à 150M3 et un tarif plus élévé au-delà
Pour approfondir la réflexion
En complément du livre d'henri smets cité ci-dessus
les
nouveaux tarifs pour l'eau potable qui décrit de nombreuses expérience de modulation tarifaire non seulement en france mais sur toute la planète on peut citer le site Wikiwater principalement réalisé par le réseua Caritas international avec le concours "d'ingénieurs sans frontière"
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