Il n'est pas trop tard pour faire écho aux bonnes nouvelles qui nous sont arrivés de Grèce cet été. Nos médias dominants , totalement dédiés à promouvoir la résignation et la désespérance face à la casse des services publics, se sont en effet bien gardés de relayer ces informations.
Rappelons
le contexte : comme condition de l’aide financière apportée
par la « troïka » (Union européenne, Banque Centrale
européenne, FMI), la Grèce s’est vue imposer des mesures
d’austérité drastiques et la privatisation de plusieurs
entreprises publiques. Parmi celles-ci, les compagnies de l’eau
d’Athènes et de Thessalonique – deux entreprises rentables que
personne, localement, ne souhaitait voir passer sous le giron du
privé.
le 18 Mai, à
Salonique , deuxième ville du pays par sa population et par
importance, les citoyens ont pu exprimer aussi leur avis sur la
décision prise par le gouvernement de privatiser
la Société hydrique et de solder ainsi l'eau à quelque entreprise
privée,
éventuellement quelque multi-nationale étrangère, de celles qui
se sont enrichies ces dernières années en mettant les mains, à des
prix au rabais, sur un bien commun d'importance fondamentale.
98 % de non à la vente de l'eau public aux entreprises privées
Nonobstant
les menaces du gouvernement qui à la veille du scrutin, avait
déclaré illégitime la consultation en menaçant de rétorsions
ses
organisateurs,
le
résultat du référendum
a été impressionnant, avec 98%
de 'non' à la décision de vendre l'eau publique aux
entreprises privées.
Ce
résultat
de Salonique est important : après
les mobilisations massives réussies en Italie, à Madrid, à Berlin,
contre la privatisation de l'eau, il s'agit d'un formidable acte
de désobéissance de masse aux
décisions du
gouvernement hellénique et adressée
aux entreprises privées candidates au rachat de la compagnie de
Thessalonique : en première ligne, la multinationale
française Suez-Lyonnaise,
toujours
prête quand il s'agit d'utiliser les profits amassées sur notre dos
pour faire mains basses sur l'eau potable d'autres pays et la
société
israélienne Mekorot,
sinistrement célèbre pour ses pratiques de détournement et de vol
de l'eau des territoires occupés palestiniens.
La justice grecque met son veto à la privatisation de l'eau de la capitale
Dans
un premier temps, le
gouvernement Samaras a fait savoir que ce
résultat n'a aucune valeur légale (au
motif que
selon
la
loi seuls
sont valables
les référendums
sur les mesures
gouvernementales accompagnés
d'un décret présidentiel ou par une
majorité
de
parlementaires).
Mais
il a préféré
attendre
l'avis
du Conseil d'Etat sur la constitutionnalité
de la privatisation de la
compagnie publique des eaux d'Athènes.
Cette
décision, fin Mai, a constitué un cinglant échec
pour le gouvernement mettant son veto à la privatisation de la
régie athénienne. Dans son arrêt, le
Conseil d’Etat a estimé que :
«la
transformation d’une entreprise publique en entreprise privée
ayant pour objectif le profit fait peser une incertitude sur la
continuité de l’offre de service public abordable et de qualité».
Cette décision a redonné le moral aux employés d’Eyath, a
compagnie publique de Thessalonique : «S’il est contraire à
la Constitution de privatiser l’eau d’Athènes, pourquoi en
serait-il autrement à Thessalonique ?»
A la suite, courant
juillet, c'est au tour du tribunal d’Athènes d'enjoindre HRADF
(le fonds privé, chargé en Grèce de la vente des
biens publics), de répondre à la demande d'information
présentée par “l’UCE (Union Citoyenne pour
l’Eau)”, branche du syndicat des coopératives de
l’eau de Thessalonique, créée par Initiative K136, pour
obtenir 51 %
des parts dans EYATh, la compagnie publique d’eau de Thessalonique,
au nom des citoyens.
Par
trois fois, HRADF avait refusé de donner des informations sur les
processus de privatisation, sous prétexte qu’elles étaient
réservées aux éventuels acquéreurs privés. Le tribunal
d’Athènes juge que HRADF ne peut se réclamer de son statut
d’entreprise privée et doit se soumettre à une certaine
transparence, ainsi que l’impose la décision de la Cour Européenne
de Justice du 19/12/2013 Case Fish Legal dictant que « l’accès à
l’information sur l’environnement, l’eau, l’assainissement et
la privatisation de ce secteur, dans le cas où des compagnies
privées ont reçu une délégation de l’Etat pour réaliser ces
travaux dans le cadre du « service public » doit être
facilité. »
Le gouvernement fait machine arrière
Résultat, la décision annoncée le 14 juillet 2014, à l'issue de discussions entre le premier ministre Antonis Samaras, le leader de la coalition gouvernementale Evangelos Venizelos et deux ministres clefs, de ne pas privatiser les compagnies grecques publiques de distribution d’eau et d’assainissement. Cette décision qui tire les conséquences de l'arrêt du conseil d’Etat sur la compagnie publique d'Athènes s’applique également pour Thessalonique.Ce virage à 180° démontre la dynamique gagnante de l’exigence populaire de voir l’eau reconnue comme un bien public, à protéger de la convoitise des chasseurs de profits.
Il est grand temps que les dirigeants de l'agglomération du Val d'Orge, intoxiqués par des décennies de domination des entreprises privées, donnent enfin la parole à leurs électeurs pour se ressourcer et cesser leurs ronds de jambes.
Vite, une consultation publique sur la création d'une régie publique pour l'eau du Val d'Orge!
(sauvez l'eau en grec)
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